9 avril 1921
Je crois que l'Europe
n'interviendra plus. Elle contiendra tant bien que mal
l'Armée Rouge aux frontières polonaises. Elle refuse de
voir qu'une autre guerre a commencé en 1917. Si cela va
trop mal sur le vieux continent, les patrons briseront
les grèves et les généraux prendront le pouvoir. Mais ce
sera pour recommencer les erreurs des bourgeois et des
officiers de la Russie impériale. la Réaction ne peut à
elle seule triompher de la la Révolution. Il faut
opposer à cette force une autre force, à cette idée une
autre idée, à ce rêve un autre rêve. Tout se trouve en
Asie. L'Europe devient sénile, incapable de vivre une
grande aventure. Elle a eu sa chance au XVIII° siècle et
l'a perdue avec Napoléon. Elle est vouée à la
balkanisation confortable. Le XIX° a été celui de
l'Amérique. Le XX° sera celui de l'Asie. Tout peut se
jouer ici. L'Asie est jeune, violente, pure. Il faut
créer deux bastions de résistance entre la subversion
russe et le chaos chinois : la Mongolie et la
Mandchourie. Deux peuples ressuscités prouveront à
l'Internationale qu'il existe encore des patrie. Ici
doivent régner l'ordre, c'est-à-dire la différence et la
hiérarchie. Puis nous rallierons les Bouriates et les
Kirghiz, nous pousserons vers le Turkestan, le Tibet, la
Corée, le Cachemire... Je vais sonner le grand réveil
des peuples qui se joindront à nous pour rester libres,
pour devenir eux-mêmes, pour conserver leur héritage et
leur foi. Face à l'Internationale de Moscou, je veux
fonder l'Internationale d'Ourga.
20 avril 1921
Mon "frère" chinois Shan Kuju est parti avant-hier. Il m'a annoncé que son chef
Chang Tso-li se séparait du général Wu Peifu. une
nouvelle guerre civile éclatera fatalement avant un an.
Mon ami m'a offert le poste d'instructeur en chef de
leur armée. Ma division resterait en Mongolie, qu'elle
tiendrait avec les troupes des atamans. Refus brutal.
Mes jours sont comptés. Je ne peux pas mourir en général
chinois. Mais tel que je suis : Junker balte, général
russe et prince mongol. c'est déjà beaucoup pour un seul
homme. Je ne suis pas un aventurier ou un mercenaire. Je
suis l'homme d'un rêve. On ne change pas de rêve pas
plus qu'on ne change de peau.
Cité par Jean Mabire,
Ungern, le
baron fou
Non datée
«
Une campagne sérieuse est menée avec grand succès
pour l'unification de la Mongolie Extérieure et
Intérieure et pour rassembler toutes les tribus de
la Mongolie Occidentale et Orientale dans le bercail
de la "plus grande Mongolie" et je suis sûr des
efforts du Bogdikhan et des miens. À ce moment
l'attention principale est attirée par les provinces
orientales de la Mongolie qui doivent nous servir de
barrière sûre contre l'agression de la Chine
révolutionnaire. Ensuite des mesures seront prises
afin d'annexer la Mongolie Occidentale. D'après les
plans approuvés, les provinces annexées ne seront
pas soumises au pouvoir du conseil des ministres
d'Ourga, mais elles conserveront les droits
inviolables de l'indépendance des « aimaks » ; leurs
propres tribunaux et lois, leur propre structure
administrative et leurs coutumes sociales ne formant
qu'une unité militaire, financière et économique
dans une alliance défensive sous la bénédiction du
Bogdikhan. Le but de cette alliance est double: elle
doit d'une part offrir à toutes les tribus d'origine
mongole l'occasion de se grouper autour du même
centre, d'autre part elle doit servir à la défense
militaire et morale contre l'Occident pourri qui se
trouve sous l'influence de la folle révolution,
ainsi que contre la dépravation des mœurs dans
toutes ses manifestations, physiques et
spirituelles. Quant aux régions de Kobdo et d'Ouriankhai,
je suis tranquille. Les habitants de ces districts
se joindront facilement à nous, puisqu'ils ont
essuyé eux-mêmes le joug de la République chinoise
et la lourde main des communistes révolutionnaires
chinois et des bolchevistes. »
Non datée
«
Il faut appuyer avec vigueur dans tous les
pourparlers la nécessité de sauver la Chine de la
mort révolutionnaire par la restauration de la
dynastie mandchoue qui a tant fait pour les Mongols
et qui s'est couverte de gloire immortelle... Je
vais commencer le mouvement vers le nord et
j'ouvrirai dans le proche avenir les hostilités
contre les bolchevistes. Aussitôt que je réussirai à
donner une impulsion forte et décidée à toutes les
troupes et personnes qui désirent ardemment lutter
contre les communistes et aussitôt que je verrai une
révolte organisée en Russie (contre les
bolchevistes) conduite par des hommes dévoués et
honnêtes, je me tournerai vers la Mongolie et les
provinces alliées aux fins de la restauration de la
dynastie Tai-Tsing dans quoi je vois le moyen unique
de combattre la révolution mondiale. »
Cité par Erik Sablé, Ungern |