Michel Vieuchange à Tigilit

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"La pièce où je suis a un plafond de lattes serrées les unes contre les autres et reposant sur de solides troncs de palmiers équarris : bois jaune et fibreux. Fusil pendu au mur. Dans les trous de la muraille, on entasse toutes sortes d'objets - sucre, peignes, babouches - ce sont les placards. Au sol une grande natte que Chibani a apportée et étalée. Je suis assis sur le bât du chameau.

C'est là que je dors, que je mange des dattes pas mûres, de la gazelle en brochettes ou en sauce toujours fortement pimentée - servie dans une grande cuvette d'émail blanc et bleue qu'on est tout étonné de trouver là.

C'est là aussi que j'écris, que je soigne mon deuxième orteil du pied gauche dont la plaie, après s'être cicatrisée, a blanchi, s'est élargie, est devenue vilaine."

 

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A Tigilit, après l'échec du premier raid

"Dans cette attente pénible, Smara devient pour moi une chose aride. Moi-même tout entier me dessèche pour ainsi dire ; ma tête se resserre autour de cette seule volonté que je sens en moi, dure, irrévocable : en finir, atteindre mon but. Et cette évocation même ne me donne point de joie. Je ne puis faire naître cette exaltation qui m'emporte à d'autres moments. Je ne suis que crispé. Je n'ai aucune parcelle de douceur en moi. Je ne puis plus penser aux miens, à l'avenir, au passé. Je me sens dans un éloignement, dans une solitude presque inhumaine. Une seule chose s'impose qui n'admet pas qu'un instant je m'en sépare. Je n'ai plus de ces craintes, maladies, oued Dra enflé, puits desséchés, homme de mauvaise volonté, fourberie des cheikhs, rien de tout cela. Les jours ne comptent plus. je suis un peu comme le jouer qui perd et qui s'entête."

mercredi 22 octobre

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