> MA DERNIÈRE RENCONTRE AVEC THÉODORE MONOD 

SOMMAIRE

Biographie
La mort de Théodore Monod (2000)
Théodore Monod et le désert

Documents

Trois lettres de Louis Massignon à Théodore Monod   
Colloque Louis Massignon (1990)
Témoignage sur Louis Massignon (1990)
Correspondance (1990)
Forum méhariste de Saint Poncy (1999)

 

 

Retour à Théodore Monod

 

 
C'est à Sana'a, capitale du Yémen, en mai 1995, que ma route a croisé une nouvelle fois Théodore Monod. A cette époque, je dirigeais le Département de français de l'Université. Théodore Monod était venu, lui, pour une ultime expédition dans le sud du pays à la recherche de différentes plantes dont le "Boswelia Sacra", "la plante du véritable encens".

 

 

"En mai 1995, un voyage a marqué une étape de ma vie. C'était au Yémen, pays abrité par la corne de l'Afrique. J'ai écrit le chiffre 20 000 sur mon herbier. J'avais dit m'arrêter à ce chiffre, sorte de point final. mais ma curiosité m'engage à découvrir encore. C'est la plante du véritable encens qui porte ce chiffre. La flore yéménite est loin d'avoir livré tous ses secrets. Les espèces y sont si variées, elles n'ont pas été répertoriées dans cette région volcanique, étrange, presque inhumaine. 60°C de température, cinq heures de marche pour atteindre le sommet du volcan d'Aden, le mont Shamsan, puis un bivouac de nuit dans le vent froid, voilà qui élimine les chercheurs de denrées rares. [...] Avec un ami ethnologue, nous avons effectués 34 stations et récolté 850 plantes, dont l'Euphorbe, très rare, utilisé par Hippocrate, il y a 2500 ans, pour ses vertus purgatives. Certaines plantes sont peu accueillantes. Elles piquent, émettent des signaux olfactifs plutôt nauséabonds afin de renseigner les agents pollinisateurs. J'en ai trouvé dans le creux d'un volcan où fut pratiquée une religion très ancienne, le zoroastrisme, dont l'un des rites consistait à déposer les morts sur une dalle à ciel ouvert. C'était le festin des corbeaux.

Pour trouver le "Boswelia Sacra", nous avons "enquêté" auprès de la population, une centaine d'habitants d'un village retranché du temps, de la civilisation et peuplé de nomades, d'agriculteurs et de pasteurs. ce fut un bonheur de rester quelques jours dans ce lieu originel. Cet arbre disparaît, car les chèvres s'en nourrissent et l'agriculture en terrasses entre 1000 et 3000 mètres d'altitude contribue à détruire la flore."

Théodore Monod, Le chercheur d'absolu, le cherche midi éditeur, 1997