Retour à Novalis - Rudolf Steiner 

Novalis

 

 

 

 

 

 

 

 

Der BergmannLied - Henri d'Ofterdingen

 

Le maître de la terre

Ses profondeurs arpente,
Ni peines ni misères
Ici ne le tourmentent.

 

Des cristaux et des pierres

Les secrets il pénètre ;

Dans le sein de la terre

Il règne, il est le maître.

 

Le souffle de la mine
Son visage caresse,
Le gouffre s’illumine
De lueurs enchanteresses.

 

 La mine l’ensorcelle,
Lui parle tendrement,
Il s’enflamme pour elle
Comme un fougueux amant.

 Traduction P. Paccoud

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les Nouvelles de la Société anthroposophique en France, janvier - février 2003

« Dans l'histoire universelle, chaque grande individualité a une tâche particulière et irremplaçable. Elle possède quelque chose que l'on ne peut pas confondre, une sorte d'écriture spécifique. Celle-ci apparaît naturellement de façon appropriée en cas de rayonnement spirituel pénétrant dans le mouvement anthroposophique. Un trait dominant émanant de l'individualité Novalis peut-être saisi comme idéal de rajeunissement. D'une manière juvénile des forces spirituelles régénératrices s'écoulent de cette individualité. Mais que signifie exactement ce "rajeunissement" ?  Que signifie-t-il quant à son mouvement intérieur? Et comment chacun en particulier peut-il en suivant ce mouvement se rattacher réellement au courant de Novalis?

De telles questions seront au cœur des conférences - Lors d'échanges elles pourront, à partir d'un effort commun, être approfondies et élargies. »

Florian Roder

26-27 octobre 2002, congrès en Alsace, au Kleebach

L'idéal chez Novalis et le travail anthroposophique

Du dernier congrès au Kleebach animé par Florian Roder sur les forces de rajeunissement chez Novalis, j’ai retenu quelques aspects qui me semblent stimulants pour le travail anthroposophique. La longue fréquentation que Florian Roder a de l’œuvre de Novalis lui permet de le laisser nous parler comme s’il s’adressait à nous aujourd'hui.

Aussi, la venue prochaine de Florian Roder à Paris nous apparaît-elle comme une opportunité de nous approcher de cette individualité si importante pour tous ceux qui s’intéressent à l’anthroposophie.

(Les propos qui suivent n’engagent que l’auteur qui les a élaborés et rédigés à partir de l'exposé de Florian Roder).

 D’un côté, nous pouvons observer que l’élément de la pensée a à voir avec la clarté qui descend en nous. C’est ainsi que nous faisons pénétrer des idées en nous qui sont comme de la lumière s’insérant par en haut dans notre esprit. Nous avons alors affaire à un processus achevé, quelque chose de « vieux » en nous.

A l’opposé, nous trouvons la chaleur dans la volonté qui monte des profondeurs. Nous avons ici affaire à un processus en mouvement, animé par des forces de jeunesse.

Quand l’élément de la clarté qui descend et celui de la chaleur qui monte se rencontrent, on assiste à l’éclosion des forces du cœur que la langue allemande désigne sous l’appellation de « GEMÜT ». Cette pensée pénétrée de chaleur n’est rien d'autre qu’un idéal, à savoir une idée en mouvement, orientée vers un but.

Rudolf Steiner s’est exprimé comme suit à ce propos : « Toute idée qui ne devient pas en toi un idéal tue en ton âme une force; toute idée qui devient un idéal crée en toi des forces de vie » (L’Initiation ou comment acquérir des connaissances..., GA 10 Ed. Triades, p.38).

On peut constater que si l’idée reste de la lumière condensée, l’idéal tend à vieillir... A l’inverse, on peut observer que des sentiments juvéniles trop forts tendent à déborder. Le tout est de chercher l’équilibre entre les deux forces de manière à vivre de façon juste notre idéal.

Quand on exerce régulièrement cette recherche, on assiste à la naissance d’un germe intérieur qui a affaire au Moi supérieur.

Dans Henri d’Ofterdingen, il est question d’ASTRALIS. Novalis évoque un processus d’interpénétration de clarté et de chaleur... Ce qui en résulte, c’est le germe magique de l'Homme où réside toujours de la volonté.

Qu’est-ce que cela signifie pour la Société anthroposophique ?

Il ne s’agit pas de chercher des résultats, mais de s’intéresser à des processus. La formation d’un idéal n’est jamais quelque chose d’achevé, mais résulte des expérimentations intérieures que nous faisons à titre individuel. Grâce aux efforts que nous réalisons dans ce sens, nous nous éloignons d’une « anthroposophie de la représentation » où l’on se meut d’abord dans le domaine abstrait des connaissances. En approfondissant méditativement la formation d’idéaux en nous, nous nous apercevons que nous quittons le monde de la connaissance pour celui que Novalis appelle le monde de l’extase, c’est-à-dire d’une extase réfléchie.

Le changement qui s’opère ainsi en nous nous donne à penser que l’anthroposophie n’est pas achevée; au contraire, elle nous appelle en permanence à une tâche de rajeunissement.

Il existe des conditions pour pénétrer dans le domaine de l’extase, comme par exemple celle du Phénix, cet « oiseau spirituel de notre être supérieur » qui peut renaître si l’élément ancien en nous s’est consumé en cendres à travers ce que Rudolf Steiner appelle l’expérience de souffrances intenses de l’âme.

Si nous nous interrogeons dans ce sens sur notre rapport à Rudolf Steiner, nous constatons que nous avons toujours un point de vue à défendre, sinon à imposer, à ce propos. De la sorte, nous avons affaire à une pensée tournée vers le passé, à une pensée vieillie. Novalis ne s’intéresse pas à cela. Ce qui l’intéresse, c’est de faire jaillir une profonde conviction, libérée de la nature tête de l’Homme. Ainsi naît en l’âme une mobilité « élastique » où compte non seulement mon point de vue, mais où la conviction d'autrui est aussi importante que la mienne car il a intériorisé un autre aspect de l’anthroposophie. En ce sens, Novalis cherche un espace où l’on n’efface pas les particularités, mais où l’on échange à partir de différents points de vue.

Antoine Dodrimont